Le projet d’exposition de Nicolas Fleming consiste à reconstituer l’espace de bureau de Plein sud à l’intérieur de la salle d’exposition. Avec cette œuvre, l’artiste propose ainsi une construction reconnaissable, et de dimensions similaires à l’espace original. Conséquence de cet ambitieux projet, il serait par exemple théoriquement possible de transporter le personnel de Plein sud dans le bureau recréé par Fleming à l’intérieur de la salle d’exposition, et, en contrepartie, d’ouvrir les bureaux usuels de Plein sud au public pour les présenter comme sujets de l’exposition. Ce renversement des rôles et des fonctions salle d’exposition/bureau serait saisissant, mais il demeure impraticable : les mobiliers et les espaces architecturaux créés par Nicolas Fleming se présentent comme des chantiers, à l’état clairement inachevé, pas plus habitables que fonctionnels. Le bureau, exposé comme œuvre d’art, n’est plus « productif ». Sa recopie dans la salle d’exposition, en contreplaqué, en feuilles de gypse et en styromousse le rend impropre au travail. Ce renversement opéré par Fleming transforme cependant l’espace public de la salle d’exposition en espace individuel privé, réinterprétant ainsi une partie de l’ensemble des mécanismes, des processus et des conditions qui donnent lieu à l’existence même des expositions, interrogeant les institutions du monde de l’art, ses environnements et ses contextes dominants.
La source de l’œuvre Le bureau, à savoir un espace existant et reconnaissable, s’inscrit dans un nouveau champ d’intérêt au sein du travail de sculpture et d’installation de Fleming. Cette référence claire à un lieu précis, et le renvoi au monde de l’art, justement par le choix du lieu, rend possible d’envisager le déploiement de l’installation Le bureau dans sa relation à l’architecture et à l’administration de Plein sud. [...] Cette mise en lumière par Fleming du cœur administratif de Plein sud l’inscrit dans une lignée artistique conceptuelle et post-conceptuelle — entre autres issue de la critique institutionnelle des années 1960 à 1990 — qui interroge les institutions et les idéologies dominantes du monde de l’art. Les cas historiques de galeries laissées vides, fermées aux publics ou mettant en scène l’institution de manière autoréférentielle sont nombreux et pluriels. [...] Fleming se trouve à performer le cadre de diffusion de l’art, c’est-à-dire qu’il reconduit les paramètres de son contexte d’apparition : nous passons d’une appréciation formelle de son œuvre installative à une réflexion sur les conditions de possibilité de la présentation de l’art [...]. »
— Extraits du texte de Florence-Agathe Dubé-Moreau
Biographie
Nicolas Fleming a obtenu un baccalauréat à l’Université Concordia à Montréal en 2001 et une maîtrise en arts visuels et médiatiques à l’Université du Québec à Montréal en 2007. Il a présenté près d’une quinzaine d’expositions individuelles depuis 2006 au Québec, au Canada et aux États-Unis. Il est diplômé du programme d’arts visuels du cégep Édouard-Montpetit à Longueuil en 1998. L’artiste vit et travaille actuellement à Toronto.
Nicolas Fleming remercie le Conseil des arts du Canada.
Publication
Florence-Agathe Dubé-Moreau
Nicolas Fleming : Œuvres 2014-2019
Longueuil : Plein sud édition
2019, 112 pages